SEX PISTOLS : LONDRES, Crystal Palace, 27 Juillet 2002
Juin 2002, l'entreprise où je travaille va fermer. Sept ans que j'y bosse, pas de vacances l'été, donc pas de Pistols en juillet 96 au Zénith de Paris. Cette fois-ci, c'est la bonne, je prends mon indemnité de licenciement puis ma place de concert et un billet de train aller-retour pour Londres. Le groupe joue le 27 juillet dans le petit stade Crystal Palace, un terrain de foot au sud de la capitale anglaise en direction de Croydon. Loin du format du Wembley Stadium, il donne une taille humaine à l’événement et me permet de profiter au maximum de la journée.
Les Sex Pistols, pour moi, c'est comme Green Day pour Eléonore et les Cramps pour Patrick Bainée. Je suis tombé dedans quand j'étais petit et je ne m'en suis jamais remis. La faute à un cousin qui m'a montré une photo du groupe où Rotten fait la grimace, Sid Vicious a des pansements sur le visage et les fringues du groupe sont absolument terribles. Je n'ai jamais vu un truc pareil avant, à une époque où les hommes ont plutôt le look de Mike Brant ou Joe Dassin, les Sex Pistols ont l'air de vrais extraterrestres ! Fin 70, j'ai 10 ou 11 ans et cette photo va vraiment me marquer. La suite n'est pas facile, le Punk est derrière moi quand j'arrive au collège, les années 80 naissantes apportent leurs lots de Cure et Simple Minds. Heureusement, il y a l'album Never Mind The Bollocks offert par mon père, puis les faces B des singles trouvés lors de séjours en Angleterre, les vieux Best et Rock & Folk achetés par correspondance pour en savoir plus, toujours plus, sur le groupe dont on ne parle plus beaucoup dans les 80's. Les livres, les cassettes live échangées ou achetées dans la cour du lycée, de nouveaux voyages outre Manche, les fringues, les boutiques de Kings Road aux creepers shoes hors de prix, les rencontres, les VHS, les bootlegs que je commence à acheter quand les tarifs ne sont pas délirants. Et puis internet arrive, les contacts avec les collectionneurs sont plus faciles et plus rapides. La découverte de fanzines, de nouveaux enregistrements live ou studio... et enfin l'annonce du concert à Londres en juillet 2002 et l'opportunité de voir enfin les Sex Pistols live, ce dont je rêvais depuis longtemps.
Après une halte dans la banlieue parisienne, j'arrive au Crystal Palace où je retrouve des potes anglais et français. Certains ont la chance d'avoir trouvé des invitations pour la soirée backstage, pas moi, tant pis. Je m'installe dans les tribunes avec une partie de la clique et un journaliste de Rock & Folk avec qui j'ai fait une partie du voyage. Il est avec Eric Debris de Metal Urbain, la discussion tourne autours du Punk, évidemment...
Après une succession de groupes, dans l'après-midi (Dropkick Murphys, The Libertines, etc.) et quelques défilés de 'posers' lookés 77, le concert débute vers 21h00 avec Silver Machine, la reprise d'Hawkwind, un clin d'oeil à Lemmy Kilmister qui a repris God Save The Queen des Pistols quelques années avant avec Motörhead. Totalement inattendu mais vraiment synchro, un long courrier survole le stade pendant l'intro de Holidays In The Sun enchainée à Silver Machine. Un type se fait sortir par le service d'ordre pour avoir jeté quelque chose sur le groupe. "first asshole of the night promptly removed' s'exclame Rotten. I Wanna Be Me, No Feelings, puis, avant la reprise de Substitue, il rend hommage à John Entwistle, bassiste des Who décédé un mois plus tôt. 'He's alright, he's in a fuckin' better place than us'. Pretty Vacant met les frissons, les faces B aussi, Did You No Wrong, Satellite, j'hallucine, ils sont là à quelques dizaines de mètres de moi, ces foutus Sex Pistols que je rêvais de voir en concert depuis si longtemps. Le controversé Belsen Was A Gas (dont les paroles ont été modifiées) est enchaîné à Bodies qui reste un de mes titres préférés. 'Mommy, I'm not an animal !'. Suivent d'autres titres de l'album Never Mind the Bollocks, des reprises que le groupe avait coutume de jouer en 76 mais aussi Thru My Eyes des Creation, jamais sorti de la salle de répétition à l'époque. Rotten présente No Lip comme 'une autre face B' sans doute perturbé par l'ambiance de la soirée (des flics et quelques punks sont tendus au point de s'affronter). Il s'en prend ensuite à Tony Blair et au 'champagne socialism' puis demande au public s'il préfère New York ou Did You No Wrong. Les premiers rangs répondent New York et le groupe joue... Did You No Wrong. Ils sont joueurs, ces Pistols ! Mais New York fait quand même partie du set comme la version punk du My Way de feu Sid Vicious jouée vers la fin du concert. En attendant c'est No Fun qui maintient le public à température élevée. La reprise des Stooges fait partie des set-lists du groupe depuis 1975. Dans les 80's, jaloux et frustré, Nick Kent prétendra avoir initié les Swankers (pré-Pistols) à la musique d'Iggy et ses Stooges. En toute humilité, comme à son habitude.... Rotten termine le titre en balançant 'je suis impatient de lire la mauvaise chronique dans le NME' (journal pour qui bossait Kent dans les 70's).
Je n'ai jamais vu les Sex Pistols au 100 Club en 76, mais ce soir, je suis convaincu que c'était quasiment pareil. Un public au bord de la crise de nerf et un groupe déterminé à mettre tout le monde K.O, bref, une journée parfaite. Il ne me restait plus qu'à regagner l'hôtel, accompagné de quelques français 'experts' qui analysaient déjà la soirée, convaincus que le groupe ne savait toujours pas jouer. Légende urbaine tenace. Pour ma part, j'avais pris un réel plaisir à voir enfin les Sex Pistols sur scène et les nombreux enregistrements 'audience' apparus peu après m'assuraient que le gang de Rotten n'était pas si mauvais qu'on le laisse entendre, même s'il ne s'agissait pas là de leur meilleur concert. Et puis, a-t-on déjà demandé à un groupe Punk de jouer comme Led Zeppelin?... non, and we don,'t care.
Double LP made in Scotland |
Fernand Naudin
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