Il y a un moment que je voulais écrire quelque chose sur Scuba Drivers et je me décide enfin à le faire en réécoutant le mini LP de 1989. Sans doute le groupe le plus riche de ce que la scène locale périgourdine a pu produire de Rock dans la deuxième partie des années 80 (pardon pour les autres), il reste celui que je préfère.
Par contre, je ne vais pas raconter de salades, quand le single I Don't Need Spell et le mini LP Welcome To Hard Times sont sortis, j'étais loin de tout ça, aussi bien géographiquement que musicalement. Car honnêtement, le Rock français de l'époque m'ennuyait un peu, les sons de guitares timides, typiques des mid 80's, les albums ruinés par des producteurs sourds, etc. tout ça n'était pas pour moi. Le peu d'albums que j'avais écouté m'avait fait fuir à vitesse grand V à l'exception de Fixed Up, Dogs et des groupes à grosses guitares, comme Les Thugs, OTH et Parabellum.
Scuba Drivers est donc un groupe que j'ai découvert après sa séparation. Plein d'a priori, je n'avais jusqu'alors jamais pris le temps ou la peine d'écouter ce qu'il avait fait. Connement. Quel regret j'ai eu lorsque j'ai acheté ce mini LP et que je l'ai posé sur la platine. Mais ce n'est pas de ma faute, n'est-ce pas... c'est la faute du marché du disque des 80's, la faute des producteurs sourds, la faute de MTV, la faute de Best et Rock & Folk, la faute de ceux qui ne m'ont pas offert le disque, la faute de qui vous voudrez mais pas la mienne... en toute mauvaise foi.
Bref, sur les conseils avisés de mon disquaire local, j'ai rattrapé mon retard en achetant ce fabuleux Welcome To Hard Times et la compilation Eyes On You sur laquelle se trouve Sweet Nothing, reprise de Sonics Rendezvous Band. Rien qu'avec ça, on ne peut pas rester insensible au Rock de Scuba Drivers. Les mélodies sur All Around flirtent avec la Power-Pop des Boys, Ol' Teenage Boredom rappelle New Christs, les guitares épaisses et le solo à la fin de Heaven Or Paradise font penser à Steve Jones avec les Professionals. On est clairement plus près du Punk et de la Power-Pop que de l'univers Garage 60's. D'ailleurs, le groupe ne s'en cachait pas à l'époque: on nous compare souvent aux Stooges, Radio Birdman, MC5 mais je pense que les Scuba sont dans certains cas plus proches des groupes punk '77 (...) On n’a pas grand chose à faire du son des années 60 : on vit en 89 (Abus Dangereux face M. Oct./Nov. 89).
Avant ce mini LP, il y eut un single, I Don't Need Spell qu'on retrouve sur le CD de 2016. Ensuite, et en même temps, des participations à diverses compilations comme celles de Closer, Gougnaf et Go Get Organized permettent de découvrir d'autres titres aux côtés de groupes punks comme Les Rats, Les Cadavres ou Kambrones. Lorsqu'on les interrogeait à propos de leur présence sur de tels albums, ils expliquaient leur choix le plus simplement du monde: le principe pour nous est d’essayer de toucher un maximum de gens. Le problème en France est que les gens qui jouent la même musique que la nôtre, cataloguée plutôt garage, ont du mal à passer auprès d’un public plus large, punk ou alternatif. Le fait d’être sur des compilations permet de toucher ces gens-là. Je pense que les Scuba Drivers peuvent aussi bien passer auprès d’un public punk que d’un public rock, traditionnel. C’est pour tenter de sortir du clivage Rock’n’Roll traditionnel que l’on a accepté de figurer sur la compilation Gougnaf. (Abus Dangereux face M. Oct./Nov. 1989).
Le CD Scuba Drivers sorti en 2016 regroupe tout cela et plus encore, puisqu'on y trouve également des reprises live et studio (Sonic Rendezvous Band, Hitmen, Boys, Gorillas) ce qui en fait un disque indispensable. Ceux qui ne connaissent pas bien le groupe peuvent bien évidemment se le procurer et lire aussi l'interview d'Abus Dangereux disponible en ligne sur le site de la Fanzinothèque de Poitiers. On y apprend, par exemple, pourquoi Scuba Drivers a signé chez Spliff au lieu de Teenage Records, dans quelles conditions a été enregistré le mini album, et un tas d'autres choses passionnantes.
Fernand Naudin
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