Spunk : label original |
A l'été 1977, l'album officiel du groupe n'est pas encore sorti et des petits malins - qui possèdent les démos enregistrées par le producteur/sonorisateur Dave Goodman - ne se privent pas pour sortir un des premiers bootlegs du groupe.
Spunk voit le jour en août ou septembre, selon les sources, soit quelques semaines avant l'album Never Mind The Bollocks. Ce disque est donc un bootleg et n'est absolument pas autorisé, ni par le groupe, ni par son management, même s'il se raconte que le manager Malcolm McLaren n'est pas étranger à l'histoire. D'autres affirment que c'est Dave Goodman, mal payé pour son travail de producteur, qui aurait décidé de se rembourser en vendant cet album.
Original tamponné par des revendeurs |
Bootleg original 12 titres |
L'usine de pressage chargée de fabriquer le disque l'a probablement fait sans savoir qu'il s'agissait d'un bootleg puisqu'à aucun moment le nom du groupe n'apparaît (le label laisse supposer que le groupe ou l'album s'appelle Spunk). Les numéros de matrices commençant par LYN, certains affirment que Lyntone Records, à Londres, est le fabricant mais il n'existe aucune trace du pressage dans les archives de cette firme. L'information est donc à prendre avec beaucoup de précaution car ce ne serait pas la première fois que des bootleggers font porter le chapeau à d'autres pour passer entre les mailles du filet.
Juste après sa sortie, ce bootleg est piraté par un disquaire français qui reproduit exactement les mêmes labels, reprend les mêmes numéros de matrices (écrits toutefois différemment) et propose une nouvelle pochette, plus élaborée avec, au recto, la photo de la bagarre au Nashville Rooms d'avril 76, le nom du groupe en rose et no future en rouge. Au verso sont imprimés des articles de presse et la liste des titres de l'album autours d'une photo du groupe prise par Bob Gruen en 76. Cette liste de titres est un peu fantaisiste pour laisser imaginer qu'il s'agit de chansons totalement inédites.
Copie française de l'original anglais |
Sur ce point, la copie est fidèle à l'original anglais dont les titres sont tout aussi farfelus. C'est un grand classique chez les bootleggers, histoire de faire croire à l'acheteur potentiel qu'il va mettre la main sur de l'inédit, mais dans le cas présent, c'est aussi une façon de brouiller les pistes avec l'usine qui fabrique. En effet, à l'époque où le bootleg est envoyé sous presse, les seuls disques officiels des Sex Pistols sont les singles Anarchy in the UK, God Save The Queen et Pretty Vacant. Ces trois titres sont donc rebaptisés Nookie, No Future et Lots Of Fun pour que personne ne se doute de rien. Et comme si cela ne suffisait pas, les bootleggers rebaptisent aussi d'autres titres, No Feelings devient Feelings, I Wanna Be Me devient Just Me et EMI, Who Was It.
La face A contient une partie des démos de juillet 76 ainsi que la version Goodman d'Anarchy in the UK enregistrée en octobre. Sur la face B se trouve la totalité de la session de janvier 77. La qualité sonore est quasiment parfaite.
Bootleg US BLA 169 A & B |
Après la copie française, c'est au tour des USA de pirater Spunk. Plusieurs pressages existent, déclinés en différentes versions. Celle qui semble être la première arrivée sur le marché américain imite grossièrement les labels de l'original anglais, en plus rose. Les numéros de matrices sont BLA 169 A et B. La pochette est blanche avec le nom du groupe imprimé façon pochoir (certaines ont un numéro). Il existe des exemplaires, plus rares, avec les labels entièrement blancs, jaunes ou bleus dont le Golden Bullet sensé être un album de 15 titres. L'autre copie américaine a des numéros de matrices différents, BLA A et B. C'est sans doute la copie américaine la plus répandue mais aussi la plus déclinée. Outre la version du coffret Sex Pistols File, elle est disponible individuellement avec deux inserts différents et des labels vierges ou imprimés en noir et blanc (faits à partir du livre de Ray Stevenson intitulé Sex Pistols File). Ces versions américaines dateraient de 1979 ou 1980. Une autre version, plus rudimentaire mais toujours américaine, reprend l'idée du bootleg original mais cette fois sous référence BLA 669 dans une pochette toute blanche et des labels plus sobres, rose et pourpre.
Bootleg US du label TAKRL |
Les bootleggers responsables de la plupart de ces copies US sont les mêmes qui sortiront également la version TAKRL (the Amazing Kornifone Record Label, référence TAKRL929), avec pochette noire et blanche qui reprend l'idée des titres fantaisistes de l'original et les labels Spunk imprimés cette fois en noir sur fond jaune. Ces labels sont également utilisés pour un grand nombre de bootlegs TAKRL (Patti Smith, Elvis Costello, Genesis, Elvis Presley, etc.) si bien qu'il y a de quoi se mélanger les neurones. Ces bootleggers, ce sont Ken Douglas et ses associés. Douglas est le monsieur bootleg number one, celui qui sortit le Great White Wonder de Bob Dylan en 1969 suivi de près par Live'R Than You'll Ever Be des Rolling Stones. Il créa ensuite TMOQ (Trade Mark Of Quality) et TAKRL. Sa concurrente et néanmoins associée en affaires, Vikie Vinyl, sortit quant à elle le pressage BLA A/B qui figure dans le coffret Sex Pistols File. Peu de monde pour beaucoup de versions.
Bootleg US 'made in Venezuela' |
Aujourd'hui, il est impossible de dire combien d'exemplaires du Spunk original existent. A-t-il été repressé ou non ? Personne ne sait. Les copies et leurs variations sont également difficiles à quantifier, certaines pressées à plus de 1000 exemplaires, d'autres autours de 100, c'est un vrai sac de nœuds. Mais suite au succès fulgurant de ce bootleg, un autre voit le jour en 1978.
Intitulé No Future UK? comme une des premières versions originales, il contient l'intégralité de Spunk augmenté de trois titres des sessions Goodman: No Fun, d'octobre 76, Pretty Vacant et Anarchy in the UK de Juillet. Bien malin qui pourra aujourd'hui différencier Spunk de celui-ci au premier coup d'oeil car dans certains cas, ces deux bootlegs sont devenus quasiment indissociables.
LP 15 titres. Existe aussi en pochette verte et noire |
On trouve très fréquemment des copies de No Future UK? (15 titres) avec les labels de Spunk (12 titres) et des exemplaires originaux de Spunk vendus dans une pochette No Future UK? 15 titres. Pour s'y retrouver, il faut regarder les numéros de matrices près des labels. La référence de Spunk commence par BLA-169 A et B suivi de LYN4372 111 et LYN 4373 111 alors que celle de No Future UK? 15 titres est GD001 pour la face A et GD002 pour la face B. C'est bien souvent la seule façon de pouvoir différencier les deux pressages qui proviennent très certainement des mêmes bootleggers.
Spunk a été copié plusieurs fois depuis le début des années 2000. La première version reprend la pochette pourpre originale avec des labels plus clairs, l'autre repress date de 2010 et il est emballé dans une pochette pvc avec un insert papier 'wrap-around' jaune sur lequel figure une reproduction des labels originaux. Malgré la sortie officielle de 2006 (il était temps !) on continue à voir apparaître des pressages illégaux qui sont plus des pirates que des bootlegs, désormais, puisque l'album est officiel.
Spunk:
Face A: Seventeen/Satellite/No Feelings/I Wanna Be Me/Submission/Anarchy In The UK
Face B: God Save The Queen/Problems/Pretty Vacant/Liar/EMI/New York
Fernand Naudin
Une des versions de Spunk les plus rares |
Commentaires