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MONSTER STORY - BUZZCOCKS - EARLY DAYS PART 4 - 1979


Après une année 1978 riche de plusieurs tournées, de passages TV, d'albums et de singles, Buzzcocks débute 79 par quelques dates locales, dont une à la Cavendish House de Manchester en janvier avant de s'enfermer aux Indigo Studios le 25 février pour travailler de nouvelles chansons.

Pete Shelley: on a enregistré des démos à peu près au moment de la sortie de Everybody's Happy Nowadays (...) Cette session était faite pour essayer de nouvelles chansons, pas pour composer les bases d'un nouvel album ou quoi que ce soit de ce genre.(**) 

Steve Diggle: je pense que c'était une session pour poser de nouvelles idées sur bande, rien d'autre. J'avais envie d'écrire des choses avec des paroles engagées socialement. J'étais inspiré par des trucs de Ray Davies, The Clash et The Jam et j'avais envie d'écrire dans ce registre là. Jesus Made Me Feel Guilty était un squelette, une ébauche, écrite par John et moi, The Drive System était finie, prête à être utilisée par le groupe. C'était un truc assez Orwellien, à la 1984.(**)


Steve Diggle: après le premier album, on a continué à progresser. Le single Everybody's Happy Nowadays est une drôle d'histoire. Je n'entendais pas les accords que jouait Pete mais j'ai rajouté quand même un riff par dessus et ça a fonctionné. La chanson est née comme ça. Même si on était très différents l'un de l'autre, nos deux styles se complétaient naturellement. Pete écrivait des chansons d'amour, mais moi, j'étais plus intéressé par le commentaire social à la Ray Davies. Je n'aurais pas trainé avec Pete si on avait été dans la même école, mais on a quelques points communs. On a passé pas mal de temps ensemble dans les pubs. Un truc que Pete sait faire, c'est picoler ! *

Everybody's Happy Nowadays sort début mars, c'est le premier single de la dernière période du groupe chez United Artists. C'est une chanson qui montre la nouvelle orientation de Buzzcocks, Pete Shelley ne chante plus l'amour ou le sexe mais une vision philosophique de la société, entre sarcasme et sincérité. Le single entre dans les charts et offre au groupe un nouveau passage à Top Of The Pops le 9 mars.

Jon Savage: c'était un morceau étrange et entraînant qui alternait les différents sons de guitare de Shelley/Diggle (propres et spatiaux contre grunge) avec des paroles très difficiles à comprendre : Shelley était-il sarcastique ou sincère ? Cette distinction semblait importante en cette période de crise nationale (*)

Pete Shelley expérimente le LSD, bien loin du speed consommé dans le milieu punk en sommeil à ce moment là.

Jon Savage: les Buzzcocks avaient alors dépassé le réalisme social ou tout engagement politique, sans parler du 'monde réel'. En expérimentant le LSD, Shelley s'est retrouvé 'beaucoup plus cosmique, détaché'.(*) 

Pete Shelley: je réfléchissais beaucoup à la base philosophique des choses, ce qui vous mène dans des domaines très éloignés. Everybody's Happy Nowadays et Why Can't I Touch It? sont deux morceaux philosophiques. Ils traitent de la nature illusoire de l'existence, d'un état d'esprit.(*)

Le 1er mars, Buzzcocks débute une tournée de quinze jours dans le nord de l'Europe. Ils jouent en Belgique, en Allemagne, Hollande, Norvège pour finir en Suède avant de revenir en Angleterre pour une dizaine de dates.


Jon Savage: j'ai vu Buzzcocks au Marquee. Ils ont joué Moving Away From The Pulsebeat, une chanson fantastique. C'était très psychédélique, presque dansant - ils préfiguraient les Stones Roses et la transe. Au milieu de la chanson, Pete s'est arrêté pendant que le groupe continuait à jouer, et il a distribué des badges aux fans des premiers rangs. J'ai trouvé ça vraiment sympa, complètement à l'opposé de l'attitude macho qu'on voyait d'habitude. C'était un mec très disponible, intelligent et drôle, mais ça ne l'empêchait pas de foutre la merde de temps en temps.*

En avril, le groupe travaille beaucoup sur le futur album et fait la une de journaux comme le NME.

Steve Diggle: pour le troisième album, A Different Kind Of Tension, on a décidé de tout préparer minutieusement. On a exploré des zones plus sombres.

Le 21 mai, nouvelle Peel session où Buzzcocks surprend encore avec trois titres inédits qui figureront sur le prochain album, prévu pour septembre: I Don't Know What To Do With My Life/Mad Mad Judy/Hollow Inside
Ils jouent ensuite au Loch Lomond Festival qui se tient les 26 et 27 mai où ils partagent l'affiche avec les Stranglers, Dr Feelgood, UK Subs, The Skids et beaucoup d'autres. C'est la première fois que Buzzcocks participent à un événement de cette envergure.

Le 13 juillet sort le nouveau single Harmony In My Head et c'est encore un ticket gagnant pour Buzzcocks qui repasse à Top Of The Pops. Une fois encore, le groupe fait preuve d'un véritable talent pour accoucher d'un tube à mi chemin entre punk et power-pop avec des mélodies qui vous restent dans la tête éternellement. Cette fois, c'est Steve Diggle qui chante et Pete Shelley se charge des petites phrases de guitares dont il a le secret. Le single entre à la 32ème place du Top 100 des charts anglais le 21 juillet et il y reste 6 semaines.


Fin août, le groupe s'envole pour les USA. Gang Of Four assure les premières parties de cette tournée qui dure une quinzaine de jours. Un bootleg du concert au Club 57 de New York arrive en douce sous les comptoirs vers 1999 et montre, encore une fois, que le gang de Shelley est aussi bon sur scène qu'en studio. La tournée permet de soutenir la compilation Singles Going Steady que sort I.R.S, le label US de Buzzcocks.

Le troisième album, A Different Kind Of Tension, arrive en septembre, un an après Love Bites. Il a été enregistré aux Eden Studios de Londres et mixé aux Genetic Studios, produit par Martin Rushent comme les albums précédents. Courant septembre sort également le troisième single You Say You Don't Love Me.

John Robb: les Buzzcocks figuraient désormais parmi les plus grands groupes à singles britanniques et sortaient sans effort des classiques pop tous les deux ou trois mois. Chaque chanson combinait un sens aigu de la mélodie à une approche constamment renouvelée des guitares, marque de fabrique du groupe.*

Pour soutenir l'album et les singles, Buzzcocks reprend la route accompagné de Joy Division début octobre. C'est à ce moment-là que les choses se gâtent. Joy Division prend peu à peu le lead sur Buzzcocks, les critiques sont parfois sans pitié avec les groupe de Shelley et Diggle, allant jusqu'à se demander pourquoi les deux groupes tournent ensemble tellement la première partie est meilleure que la tête d'affiche. Un coup dur pour Buzzcocks qui termine la tournée sous une pluie d'asticots que Joy Division leur balancent dessus en plein concert, au Rainbow de Londres. Blague potache qui ne fait pas rire John Maher lorsqu'il prend cette pluie de petites bêtes sur la tête alors qu'il termine Boredom. Sans compter les souris lâchées dans le bus de tournée... 


L'année se termine par une nouvelle tournée aux USA avec The Fall. Les concerts se suivent et se ressemblent, les Buzzcocks sont fatigués, les deux années qui arrivent vont être difficiles. Malgré de très bonnes nouvelles compos, la sortie de nouveaux singles et une popularité qui ne faiblit pas, le split est inévitable, le groupe jette l'éponge en 1981 après trois superbes albums, des chansons magnifiques et un impact incontestable sur la scène musicale.

Steve Diggle: On avait énormément tourné et on devenait dingues. On avait aussi beaucoup fait la fête. C'était une période ou on était en train de péter les plombs, ça devenait difficile de continuer. EMI avait racheté notre label et on ne savait pas ce qu'ils allaient faire de nous. On avait l'impression de n'intéresser personne, on était à la dérive. On a enregistré encore six chansons géniales, elles sont sorties les unes après les autres, très rapidement, mais elles ne sont pas rentré dans le hit parade. Why She's A Girl From The Chainstore pose une question sociale: qu'est-ce qui a amené cette fille à travailler là? La chanson ne se moque pas d'elle. Après la sortie des singles, on est reparti au studio Pluto (studio de Manchester où The Clash ont enregistré Bank Robber). Le temps n'était pas au beau fixe. Pour différentes raisons, les relations s'étaient tendues entre nous. Pete s'est mis à travailler à part avec Martin Rushent, ils ont élaboré ses chansons et préparé des démos pour un nouvel album. Il a fini par nous envoyer une lettre disant qu'il arrêtait.*

Buzzcocks se reforment en 1989 pour une tournée mondiale, motivés par la réédition du back catalogue d'EMI, mais John Maher et Steve Garvey quittent le navire au début des années 90. Aujourd'hui, Steve Diggle est le seul membre originel du groupe formé en 1976.

R.I.P Pete Shelley

Fernand Naudin   

(*) A Different Kind Of Tension (CD 2008)
(**) Chronology (CD EMI 1997)

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